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Noël !


En cette nuit de Noël nous venons d’écouter l’Évangile de la naissance de Jésus nous pourrons regarder plusieurs points : Le contexte historique troublé au moment de la naissance de Jésus. Puis un enfant sur la paille. Enfin se mettre à l’école des plus petits.

        

Tout d’abord, il est bon de constater que l’enfant Jésus est venu sur terre dans un contexte historique troublé. Le pays de Jésus est sous occupation romaine, sous le contrôle de l’empereur César Auguste qui décide de faire compter ses populations, relayé en cela par son gouverneur de la région : Quirinius. Cette situation nous rappelle en condensé que l’histoire de l’humanité est faite de conquêtes, d’invasions, de mouvements de résistances, de populations exploitées, sans réelle liberté. De populations qui s’endorment en période fastes et qui se réveillent lorsque la difficulté, le malheur pointe son nez.

         Sous une forme ou sous une autre il y a toujours un impérialisme qui se prépare ou qui est là. Il peut être guerrier, mais il peut être aussi économique, ou encore et plus caché, un impérialisme de la pensée… qui rend tout aussi esclave qu’une invasion physique : fabrication de l’opinion qu’on peut appeler le « prêt à penser », fabrication d’un langage de façon cachée… Le principe d’une manipulation c’est d’être indétectable… Il y a moultes façons d’être sous le joug.

         L’époque où nous vivons est l’époque comme toutes les époques. Elle véhicule ses conflits, ils ne font que détruire hommes, femmes et enfants… et je le répète, si ce n’est pas physiquement, c’est psychologiquement, tout cela au milieu de gestes de don de soi comme celles et ceux qui travaillent par nécessité en cette fête de Noël pour accompagner, secourir, nourrir, soigner sans compter tous nos petits gestes de service dans le quotidien etc…    

         Aujourd’hui et pas demain, nous avons besoin du sauveur, il ne viendra pas si nous restons suspendus aux réseaux, il ne viendra pas non plus par la cheminée comme par enchantement ou magie, il ne viendra pas non plus en tgv. Il vient à pieds depuis Nazareth vers Bethléem pour naître parmi nous, au milieu de nous, un déplacement dont se seraient bien passés Marie et Joseph dans le contexte de l’attente de l’enfant Jésus.

         Mais, soumis à l’histoire et au bon vouloir des puissants qui ne font pas de cadeau et, pour répondre au dessein supérieur de Dieu, L’enfant va naître à Bethléem et ce, dans la plus grande simplicité. Au fond le voyage de Nazareth à Bethléem n’est rien face au mystère de l’incarnation. Le Dieu éternel créateur du ciel et de la terre, comment a-t-il pu faire un tel voyage, choisir une étable pour se faire connaître ? Comment a-t-il pu vivre une telle descente, un tel anéantissement, en prenant visage et corps d’homme ?       

         A bien y réfléchir, il était impossible qu’il en soit autrement. Dieu ne peut pas être Dieu d’amour s’il n’assume pas la condition humaine jusqu’au bout. C’est pourquoi nous devrions faire nos crèches dans l’endroit le plus insignifiant de notre maison… un débarras, là où il peut y avoir du désordre, un peu d’odeur, l’endroit où l’on cache vite fait, ce que l’on ne veut pas montrer. C’est pourtant bien là que Dieu nous visite en son Fils, né d’une femme, c’est dans nos débarras qu’il nous convie.

         En effet Dieu a pris le risque de la fragilité humaine pour bien nous dire : « je suis avec vous ». Et si nous n’avons pas pensé à faire nos crèches dans un débarras, le symbole demeure intact et il est encore temps de s’y préparer pour Noël 2024.

         Dieu a choisi la paille de la fragilité de nos vies pour dire son Nom et sa proximité. En retour nous pouvons lui offrir nos plus beaux trésors : ce qu’il y a de vulnérable dans nos vies, dans nos cœurs, ce qui est fragile comme un brin de paille : une situation de santé délicate, une situation relationnelle difficile en famille ou ailleurs, des éloignements qui peuvent être physiques (whatsapp ne peut pas remplacer le présentiel), une précarité matérielle, comme Marie et Joseph une situation de migrant, de déracinement, des difficultés scolaires, de la solitude, un veuvage, être ruiné, des blessures qui empoisonnent ma vie, des pardons que je ne peux pas donner, un handicap que je n’assume pas, une vie matérialiste, des addictions dont je ne peux me défaire, et par-dessus tout notre péché.

         Que de trésors à offrir dans cette grotte de Bethléem, dans ce lieu à l’écart ou pas grand monde se rend.

         Allons dans nos débarras là où ne voulons pas aller, et où nous ne voulons que personne y aille. Oui, Noël a le goût de l’émerveillement s’il a le goût de la proximité avec la sainte famille, s’il a le goût de l’humilité en faisant la vérité comme Jésus le dira plus tard. Jésus, en naissant dans l’étable, veut s’approcher de nos vies, les toucher, les réconcilier, les guérir. Mais plus il s’est approché plus ils se sont éloignés, sinon il n’y aurait pas eu la croix.

         Les artistes ont tout compris : Telle toile présente l’étable en forme de tombeau. Telle autre, la mangeoire prend l’allure d’une couronne d’épine. Un vitrail de la cathédrale de Chartres : présente le tout petit bébé sur un autel, l’autel du sacrifice. Nous nous donnons donc rendez-vous à Pâques.

         Mais dans ce monde au temps de la naissance de Jésus, il n’y avait pas que les grands, les puissants, ceux qui, comme aujourd’hui, veulent imposer leurs vues, qui veulent se faire proches mais ne le sont pas, ou ne le sont plus. Dans la contrée, veillaient les travailleurs de nuit comme celles et ceux qui veillent au travail au cœur de cette nuit (par ex dans les hôpitaux).

         Ce sont ceux qui sentent le suint, les bergers, ce sont eux qui ont été touchés les premiers. Il s’agit d’un reversement total des valeurs. Une invitation a sans cesse nous mettre à l’école des plus petits, à l’école de l’inattendu.

         Nous nous mettons à l’école de l’enfant, et en regardant l’enfant, l’écouter pour lui proposer une vraie vie afin de préparer un avenir digne pour lui.

         A l’école de la personne malade, en l’écoutant, nous la laissons-nous évangéliser. Nous visitons les malades, n’ont pas d’abord pour les servir, mais pour nous faire évangéliser par eux, leur souffrance est un livre ouvert.

         A l’école du blessé, nous l’écoutons, pour y panser grâce à lui, nos propres plaies.

         Nous nous mettons à l’écoute de l’athée, car lui aussi peut nous évangéliser et mettant en lumière les failles de la communauté les mal croyances, nos rudiments de formation et autres… manque de ressourcement.

         Bref les bergers d’aujourd’hui, avec leur vie diurne ou nocturne et nauséabonde nous sont bien utiles… nous voudrions les soulager alors que Dieu les a visités bien avant nous, et nous avons là un plan de bataille… la liturgie du dépouillement et de la simplicité, l’évangélisation par le renversement des valeurs, les petits comme pierre d’angle de l’évangélisation. Avec tous nos moyens de communication et de déplacements nous nous sommes installés dans une sorte toute-puissance. A force de vivre trop vite, à trop pouvoir, à trop courir, ne risquons-nous pas de passer pas tout simplement à côté de la vie ?

 

         Le contexte historique, comme au temps de Jésus, met sous nos yeux les invasions, les oppressions, les esclavages, l’enfermement de la liberté, les opinions fabriquées, les manipulations de conscience au milieu de tous les beaux gestes de don de soi que nous posons toute l’année. Dans ce contexte, comme au temps de Jésus, nous avons une belle carte à jouer, enfermons-nous quelques instants dans notre débarras, devant notre crèche pour y puiser la vie et y offrir nos vies.

Avec cette question : suivrons-nous Jésus jusqu’à Pâques en acceptant de passer par le Golgotha, la croix, la conversion du cœur ?

            Dans le monde du virtuel, nous nous souhaitons un bon, beau, vrai et joyeux Noël incarné, et enraciné dans le réel…


Michel COTTINEAU

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